dimanche, 28 octobre 2012
Mouans Sartoux-Festival du livre 2012- Le dimanche 7 octobre, Françoise Oriot a présenté Wajdi Mouawad
Wajdi Mouawad, écrivain et dramaturge – il a été artiste associé au Festival d’Avignon en 2009 – présentait cette année au Festival du Livre de Mouans-Sartoux, son dernier roman Anima, publié par Actes Sud.
C’est l’histoire d’un homme qui découvre le corps assassiné et atrocement mutilé de sa femme et cherche à retrouver l’assassin. Mais ce n’est pas le roman d’une vengeance : à l’inverse d’Œdipe qui enquête sur un meurtrier dont il ignore qu’il s’agit de lui-même, Wahhch Debch part à la recherche du meurtrier de sa femme pour se prouver que ce n’est pas lui.
S’ensuit une longue traque à travers l’Amérique du Nord, ponctuée de scènes dramatiques – parfois insoutenables.
Wahhch Debch veut à peu près dire « monstre brutal ». Ce nom est lié aux origines du personnage : un enfant palestinien rescapé du massacre de Chatila, et qui devra au terme de sa quête – comme les jumeaux d’Incendies, une des plus belles pièces de Mouawad – connaître, yeux grands ouverts, les horreurs ayant masqué cette origine.
La bestialité constitue le motif principal du livre. Bestialité au sens moderne : quand l’homme se conduit de cette façon atroce que l’on prête, à tort nous prouve Mouawad, aux animaux. Bestialité dans un sens plus général : ce qui se rapporte aux bêtes, aux bestiaux. Cette dernière acception, Wajdi Mouawad l’utilise de façon magistrale, qui rend son roman très original : les différents narrateurs seront (à l’exception des toutes dernières pages) des animaux qui, se trouvant dans le même lieu que Wahhch Debch, vont non seulement raconter ce qu’il fait, ce qui lui arrive, mais également la proximité qu’ils ressentent entre lui et eux. Ces merveilleux narrateurs sont bien rendus et très variés : chats, chiens, souris et rats, oiseaux, araignées, chevaux, un singe et une mouffette incroyables, un boa, des poissons, des insectes (mouche, abeille, coccinelle, moustique…)
Ils témoigneront pour Wahhch Debch, ils l’accompagneront dans sa lente remontée jusqu’au premier cauchemar, celui qui permet enfin de savoir d’où l’on vient, qui donne les réponses tant espérées et pourtant effroyables. Comme le personnage principal, ils sont privés de parole, exilés dans un monde rempli de cette douleur, de ces guerres et de ces massacres qui font entendre leur écho sanglant dans ce roman foisonnant.
Françoise Oriot
12:05 Publié dans Nos ami(e)s écrivent, Nos ami(e)s lisent | Commentaires (0)