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vendredi, 28 janvier 2011

Le temps des liquidateurs

J'avais écrit le O4 février 2010 - un an déjà! - sur mon blog lapoesieetsesentours.blogspirit.com sur le thème des liquidateurs, des nettoyeurs, des "Léon" de la culture ceci : "Après la suppression de la direction du livre et de la culture voilà que le Monastère de Saorge changerait de vocation: un hôtel! De luxe, on imagine! Ceux -la qui disent avoir le souci des créateurs sont prêts à brader x lieux dont le Monastère de Saorge au tourisme - "culturel" bien évidemment!!! »

Eh bien, un an après, ils sont toujours à l’œuvre les démolisseurs d’âme !

 

À Saorge, le 3 décembre 2010, Jean-Jacques Boin voit le contrat annuel qui le liait au Centre des Monuments Nationaux non renouvelé. Depuis 9 ans, ce haut lieu culturel a résonné de tant de voix d’écrivains en résidence, de concerts, d’exposition…va-t-il retourner au silence ? Pour combien de temps  et avec quelles perspectives ?

 

À Lyon, La scène poétique dont le poète Patrick Dubost s’est occupé de 2003 à 2010 à la Bibliothèque Municipale de la Part-Dieu vient de fermer son rideau. Plus d’une centaine de poètes français et étrangers sont venus risquer leur voix sur cette scène. Parmi les derniers, Bernard Noël et Charles Juliet. C’était le 15 décembre 2010. C’était la dernière séance. Patrick Dubost apprenait sans autre forme de procès la suppression du cycle 2011 sur décision unilatérale et sans discussion du nouveau directeur de la Bibliothèque !

 

À Grasse, c’est La Poésie a un visage qui passe à la trappe après 12 années d’existence. La Poésie a un visage c’était un partenariat entre la ville de Grasse, l’éducation nationale, la Drac, le Printemps des poètes, l’association Podio, Radio-Agora FM, le théâtre de Grasse, le Festival TransMéditerranée et tant d’autres. C’était durant tout le mois de mars des lectures publiques à la Bibliothèque Municipale puis à la Maison de la Poésie (créée en 2006), une exposition rendant hommage à un éditeur de poésie; des rencontres (établissements scolaires, environ 45 classes pour une quinzaine de poètes ; Maison d’arrêt…) des prises de parole sur RadioAgora FM ; une déambulation poétique en vieille ville ; des préfaces poétiques au théâtre de Grasse ; des conférences… Par manque de volonté politique et pour de mauvaises raisons économiques et de fonctionnement propres à la ville de Grasse et à la Bibliothèque Municipale, la Poésie n’a plus de visage à Grasse ! Certes, bien intentionné, le conservateur actuel entend transférer la défunte manifestation à la communauté d’agglomération faisant miroiter une plus grande audience. De ce qui n’existe pas, je ne puis juger mais à voir le fonctionnement de la Maison de la Poésie cette année, sa programmation chaotique, l’arrêt du partenariat avec l’association Podio qui depuis plus de 25 ans travaille bénévolement pour assurer au fonds Vendel de poésie contemporaine – 30000 volumes sont en dépôt à Grasse ! – un rayonnement toujours plus grand, les doutes l’emportent ! Là où il fallait consolider, on met à bas !

 

À paris, la Maison des écrivains (Mel) voit son budget menacé par l’annonce du gel de 5% du budget du Ministère de la culture. Elle devrait alors si cela se confirme renoncer à une partie conséquente de ses activités.

Ce ne sont là que quelques signes, j’y verrais quant à moi des symptômes !

Littérature, Poésie, Musique, Arts, Théâtre…cela fait lurette maintenant que la culture passe un mauvais quart d’heure ! La France avec !

La République sans la culture, c’est la nuit. La mauvaise nuit où attendent les monstres !

 

Alain Freixe

 

Serge Pey - L'Internationale du rythme - éditions Dumerchez - Lecture d'Yves Ughes

 

Couv Pey - copie 2.jpgIl est des notes impossibles à écrire et que l’on doit faire pourtant, impérativement, car les textes éblouissent.

Mais comment dire l’éblouissement ?

 

Le livre consacré à Serge Pey et l’internationale du rythme, publié sous la direction d'Andréas Pfersmann, donne le tournis ;  scandé, lancinant, fulgurant, jouant sur des accélérations et des instants de calme approfondissement il se bâtit à l’image de celui qui donne la parole aux bâtons, qui hâte la venue de la pluie et fait surgir le soleil. Une pluie de comètes dans la nuit des temps. Que le titre souligne.

L’Atelier des Brisants nous donne ici une leçon de vie, l’ouvrage fait cinq cents pages, et c’est de vitalité poétique qu’il s’agit.

Quelque soixante-quatre contributions s’appellent et se répondent pour laisser une trace lumineuse dans le ciel. A chacun de la lire, comme fulgurance. Car Serge Pey appelle d’emblée une réaction-manifeste : pas de statue pour le poète.

Tout chroniqueur ne peut qu’être confondu par la beauté des titres suscités par l’homme che impugnava un bastone…et qui se livre avec force –lo sforzo fisico- dans la mise en corps de la poésie. Tous les articles convergent pour dire ce claquement d’homme qui déchire le silence compassé du monde établi. Comment dès lors en privilégier certains et en taire d’autres ?

La note est décidément impossible.

Sauf, à prendre les grandes étapes du recueil et à procéder en descente, en spirale vers les horizons ouverts.  

Esquisses et portraits de Serge Pey. Halte 1. Fraternité. Halte II. Théorie du poème. Halte III. Le guerrier du sens : éthique et politique du poème. Halte IV. La parole des bâtons. Halte V. Poésie d’action ou « mise en rite du rythme ». Halte VI.

Chacune de ces scansions est ponctuée par des textes de Serge Pey. Deux incursions permettent d’entrer dans le livre et de suivre les rayons d’un soleil qui bascule du XX au XXIème siècle dans une pulsation déclenchée, dans une transe radieuse.

Il faut lire « la porte et la table » comme un mode d’entrée dans ce monde. Parfois en ce temps-là, les animaux remplaçaient les hommes pour crier. Prend corps ici un monde de Gardes civils, de mue de serpent, de grève, mais aussi de raisin et de couteau. Plus d’invités que prévu ? Qu’importe, la porte verticale –faite à grand peine et avec grand soin-  va devenir table horizontale, lieu d’accueil. De l’événement intensément vécu, du partage fraternel et militant mis en place autour des plats, naît un mode de poésie :

Ce trou dans la maison, durant toute une journée, est resté en moi comme la preuve d’un avenir qui accouche.

Pour manger ce que nous avions à dire ou pour écouter l’inconnu, il faut savoir ouvrir le monde.

Ce n’est pas  les mots ni les choses qui firent de moi un homme, mais les trous.

On n’écrit pas de la poésie, on vit en poésie.

Et il faut entendre la gueulante poussée par Serge contre la dispersion quand « les avida-dollars   et les roteurs d’euros se sont donnés rendez-vous à Drouot pour la vente de l’invendable ». Il s’agit bien sûr des objets agencés par André Breton en poème. Vendre ces objets qui sont les mots d’un Grand-Œuvre participe du génocide de la poésie.

Poème de bâton brandi, animé par la rage de traverser ce monde prédateur, qui accumule ses richesses pour se gaver de certitudes, ce monde toujours prompt à dynamiter toute parole qui le dérange.

Sur la tombe de l’amour fou, il ne nous reste que  nos poèmes pour faire basculer le monde du côté de la plus haute clairvoyance.

 

Ce qu’il faut d’humanité pour entrer dans la scansion du monde, ce qu’il faut de puissance pour entrer dans le rythme de la fraternité…tout dans cette approche du poète donne à l’entendre. Et le CD accompagnant le livre donne de la vie, de la voie à la richesse des mots qui constituent cet ensemble fertile.


Puisse une note impossible appeler à ce partage.

 

 

 

 

18:32 Publié dans Nos ami(e)s lisent | Commentaires (0)

Jean-Pierre Spilmont - Sébastien, éditions La fosse aux ours - Lecture de Marie Jo Freixe

« C’est une histoire d’amour qui a mal tourné » dit un fonctionnaire de police après l’interrogatoire de Sébastien un gamin à peine adolescent qui a commis l’irréparable. Le temps d’un face à face dans un bureau, le garçon, un taiseux qui a du mal avec les mots, avec les gens, se remémore une enfance sans amour, hormis celui d’un grand-père invalide, l’abandon de parents qui ont fort à faire avec leur négoce et peu de temps à consacrer à un enfant dont ils se sont débarrassés auprès d’un établissement spécialisé où viennent s’échouer ces petits hors-normes que l’on a tant de mal à comprendre  et qui semblent ne rien vouloir , ne rien attendre. Le lot quotidien de cette enfance-là c’est la violence, la haine. Dans la narration reviennent quelques bouffées de tendresse, d’amitié, et de rares moments de rêverie indicible car « les mots s’étouffent dans la gorge ». Jean-Pierre Spilmont conduit un récit percutant où se croisent deux moments : l’actualité et le passé, un passé proche et celui plus lointain de la guerre d’Algérie ; s’y croisent aussi des lieux différents qui sont presque tous des lieux de malheur . Au cœur du livre, un rapport de psychologue, figé sur « une très image mauvaise qu’il a de lui-même » que vient contredire ce que l’auteur  offre de son personnage : Sébastien voit clair dans le jeu d’adultes ou d’adolescents souvent méprisables, indifférents, voire brutaux, cruels. Sébastien aime et voudrait qu’on l’aime, il ne supporte pas l’injustice infligée à autrui ce qui peut le conduire aux pires violences mais il est sensible à la douceur des mots, des noms.

L’auteur prend le relais de celui dont il est dit dans le rapport que « ses niveaux de connaissances lexicales sont globalement déficitaires » , la langue du texte est proche de celle d‘un adolescent, souvent crue ; dans des phrases sans fioritures, incisives, qui vont à l’essentiel, elle touche le lecteur , le conduit au bord des larmes sans jamais toutefois jouer du pathos et d’une sensiblerie facile. Sébastien, un beau livre qui donne à entendre une voix  même quand «  la nuit, la ville avale les bruits à cause de tous les autres bruits. Ou bien parce que, dans une ville, personne n’écoute. »

 

 

 

 

18:23 Publié dans Nos ami(e)s lisent | Commentaires (0)

mercredi, 19 janvier 2011

2011,les voeux du Président de l'association Podio

Des vœux, pour faire quoi, dans un pays qui détient le record du pessimisme ?

Des vœux qui riment à quoi si l’on pense que l’avenir est bouché, que la vie relève d’une tension vers l’apocalypse ?
Plus que jamais, il convient de « redonner un sens pur aux mots de la tribu ». Reprendre la langue, la malaxer, la faire mal-axée, la pétrir autrement que par le sens du pouvoir et de la domination. Qu’elle éclate la langue, et laisse enfin circuler l’émotion. Ce qui nous remue et nous meut.

Alors, dans cet élan, avec allant on peut concevoir un futur, un à-venir,

Alors on peut souhaiter à tous et à toutes, d’excellents vœux pour l’an neuf. Avec sincérité.

Yves Ughes

 

 

mardi, 18 janvier 2011

Rencontre-Lecture "La marche en poésie" avec Alain Freixe et Yves Ughes à la BMVR Louis Nucéra à Nice, le vendredi 21 janvier à 17h

LectureBMVR.jpg